Recréé en 1946, l’histoire du 4e REI est marquée par la participation à la campagne de Madagascar en 1947-51, aux opérations au Maroc en 1954-55 ou à la guerre d’Algérie en 1957-62. Le 4e REI est dissous au Sahara en 1964. Son numéro, l’histoire et les traditions sont adoptées par le régiment d’instruction de Légion de Castelnaudary en juin 1980.
Introduction
En Afrique du Nord en 1907, face aux attaques contre ses ressortissants et aux menaces aux confins algéro-marocains, la France décide d’intervenir au Maroc. Les légionnaires sont en tête des troupes d’assaut. En 1912, le traité de protectorat de la France sur le Maroc est signé. La pacification du pays commençait.
Pendant la Première Guerre mondiale de 1914-1918, plusieurs bataillons et compagnies montées de la Légion étrangère sillonnent le Maroc et défendent la terre pacifiée. Une tâche très difficile puisque les rebelles marocains armés par l’étranger sont encouragés par le départ du grand nombre des troupes françaises pour le théâtre européen.
Une fois la guerre en Europe est terminée, les bataillons et compagnies montées, épuisés par les terribles combats et le défaut d’effectifs, sont devenus autonomes et continuent la pacification du Maroc. Mais en 1920, avec un nouvel afflux d’engagements de l’Europe bouleversée par le récent conflit, et en considération des nouvelles tâches géopolitiques pour la France, la Légion sera complètement réorganisée.
C’est donc le 30 septembre 1920 que le ministre de la guerre décide de réunir les différents bataillons formant corps implantés au Maroc et prescrit la formation d’un nouveau régiment de la Légion (au vrai, deux vieux régiments de la Légion seront reconstitués et trois nouveaux encore organisés entre la fin de 1920 et le début de 1921 en Algérie, au Maroc et en Tunisie).
Création du 4e Régiment Etranger
Le 4e Régiment Etranger (4e RE) est créé le 15 novembre 1920. Il est formé initialement avec quatre bataillons bien aguerris, ayant servi au Maroc depuis plusieurs années. L’une des compagnies montées lui est aussi rattachée. Le régiment, bientôt surnommé le « Régiment du Maroc », est composé de 78 officiers, 197 sous-officiers et 3 384 légionnaires, soit 3 659 hommes. Son état-major s’implante à Meknès, une ville située au nord du pays, entre les massifs du Rif et du Moyen Atlas. Le commandement du régiment est confié au Lieutenant-colonel Lucien Maurel. C’est un ancien capitaine de la Légion de 1904-1909.
Composition du 4e RE en novembre 1920 :
- Etat-major + Compagnie hors rang (CHR) à Meknès
- 1er Bataillon (l’ex-1er Bataillon du 1er RE) à Benni Mellal : Cba Lambert
- 2e Bataillon (l’ex-2e Bataillon du 1er RE) à Marrakech : Cba Astraud
- 3e Bataillon (l’ex-6e Bataillon du 1er RE) à Bou Denib : Cba de Corta
- 4e Bataillon (l’ex-6e Bataillon du 2e RE) à Meknès et Ain Leuh : ??
- 1re Compagnie Montée (l’ex-1re Cie Montée du 1er RE) à Bou Denib : ??
Au début de 1921, le régiment est remplacé à Meknès par le 2e Régiment Etranger fraîchement reconstitué. Le 4e Bataillon du 4e RE, implanté lui aussi dans cette ville, rejoindra son ancien régiment. Le P.C. du 4e RE fait donc mouvement vers Marrakech.
Le 4e Etranger au Levant en 1921-1926
En 1920, un mandat institué par la Société des Nations permit la France d’administrer au Levant (une vaste région au Moyen-Orient) la Syrie et le Liban, les pays de l’ex-Empire Ottoman occupés après la Première Guerre mondiale.
Pour participer dans la pacification de ces territoires encore inconnus aux légionnaires, un nouveau 4e Bataillon du 4e RE est organisé en février 1921 à Saïda, l’ancienne garnison du 2e Etranger en Algérie. Un mois plus tard, ce bataillon du commandant Salvat débarque au Levant. En septembre, il y est renforcé par le 5e Bataillon du 4e RE, lui aussi organisé à Saïda et placé sous les ordres du chef de bataillon Goepfert.
Ces deux bataillons, composés de trois compagnies d’infanterie et d’une compagnie montée chacun, ne connaîtront jamais le Maroc. Le 4e reviendra en Algérie en 1924 pour être dissous après quatre années de maintien de l’ordre, des travaux de route, et des constructions des ponts ou des postes militaires en Syrie. Le 5e restera au Levant pour faire honneur à la Légion pendant la Révolt druze (1925-1927), surtout dans la bataille de Messifré en septembre 1925. Après les durs combats, le bataillon quittera le 4e Etranger pour devenir un bataillon du 1er REI. Pour savoir plus : La Légion étrangère en Syrie et au Liban : 1921 – 1939
La Pacification du Maroc en 1921-1934
Au Maroc en 1921, il ne reste que trois bataillons du régiment, alors rassemblés à Marrakech. Ils sont tout de suite engagés dans la pacification du pays. Jusqu’en 1924, les unités du 4e Etranger vont opérer dans les massifs de l’ouest du Moyen Atlas et assister à la réduction de la tache de Taza, au nord de cette ville. Tour à tour, les tribus sont descendues dans les vallées et se sont soumises.
Pour conquérir de nouveaux terrains, les bataillons font partie des groupes mobiles, unités à gros effectif de toutes armes. Les légionnaires passent en colonne de longues semaines, avant d’avoir regagné leurs garnisons pour un bref repos. En même temps, connus comme des soldats et bâtisseurs, ils contribuent à la construction des postes ou blockhaus, des routes, des ponts. Pendant l’hiver, les hommes demeurent dans ses avant-postes.
En juin 1922, à cause d’un décret prescrivant la création officielle du 1er REC, les régiments d’infanterie de la Légion changent leur titre. Donc, le 4e RE devient le 4e REI. Le 11 novembre de la même année, le régiment reçoit son drapeau.
En 1921, au nord du Maroc, les tribus berbères des montagnes du Rif se soulèvent violemment contre le Protectorat espagnol au Maroc (mis en place en 1912, par la convention franco-espagnole). Après une période de neutralité, la France rejoint l’Espagne à la fin de 1924 pour se battre contre les Rifains et leur chef, Abdelkrim. Plusieurs bataillons de la Légion française, y compris ceux du 4e REI (1er + 2e), vont lutter à côte de la Légion espagnole. L’ennemi est bien organisé, bien armé et très combatif. Mais finalement, fin mai 1926, l’alliance franco-espagnole contraint les Rifains à la capitulation. Le 2e Bataillon est cité à l’ordre de l’Armée.
Trois mois plus tard, un aspect du génie apparaît au 4e REI. La Compagnie de sapeurs pionniers (CSP), créée le 24 août 1926. Rattachée administrativement à la CHR, elle est surtout occupée à la construction des pistes et routes, comme celle de Marrakech à Ouarzazate, en passant le col de Tizi n’Tichka. Une route extraordinaire, longue de 220 kilomètres.
De 1926 à 1933, les légionnaires du 4e Etranger opèrent au sud, en participant à la pénétration et à l’occupation du reste du Haut Atlas et de l’Anti Atlas. Basés à Marrakech, Ouarzazate et Agadir, ils traversent la zone inconnue vers la Mauritanie et le Sahara occidental ; l’un des bataillons assiste à la réduction de la « Grande Tache » dans l’Atlas. La Compagnie Montée, alors basée à Kerrando, assure la protection des convois de ravitaillement des avant-postes. Outre ces tâches, les unités du 4e REI construisent des nouvelles pistes, des postes, des blockhaus ou aménagent des terrains d’aviation, pour mieux éliminer les rebelles et pacifier le pays le plus tôt possible.
L’année 1932 marquera la reprise de l’offensive. Une nouvelle arme vient donc compléter le régiment : la Batterie de marche, unité d’artillerie constituée le 16 mai. Elle est équipée de quatre canons de 75 mm modèle 1897, transportés sur les camions d’une compagnie de transport (CAT). La batterie sera implantée à Ouarzazate.
En février 1933, les légionnaires de tous les quatre régiments participent au Djebel Sagho aux durs combats du Bou Gafer, face à la confédération des Aït Atta. C’était l’une des dernières grandes opérations des troupes françaises contre les dissidents marocains. Les 1er + 3e Bataillons et la Batterie de marche du 4e REI y ont pris une bonne part. En juin-septembre, c’est la conquête du Djebel Baddou pour le régiment déjà regroupé. Celle-ci est la dernière opération pour les bataillons du 4e Etranger.
Entre temps, le 15 avril 1933, la Compagnie Montée du 4e REI est devenue la Compagnie Montée Automobile (CMA/4), sous les ordres du célèbre Capitaine Gaultier. Elle participera au début de 1934 à la campagne de l’Anti-Atlas à l’extrême sud du Maroc et, au sein de cette campagne, à la première opération toute motorisée de l’armée française, menée par le Général Trinquet. Quatre unités motorisées de la Légion, appuyées par la CSP et la Batterie du 4e REI, y vont prendre part. Cette opération remarquable achèvera en mars 1934 avec succès les vingt-sept années de la pacification du Maroc, à laquelle la Légion a participé depuis le tout début…
Le 4e Etranger au Maroc en 1934-1940
La période de quatorze années de combats se termine pour le 4e REI. Désormais, le Maroc est transformé en un immense chantier et les légionnaires participent aux différents travaux. Chaque année, le régiment réalise des dizaines de kilomètres de route. C’est aussi la transformation du port d’Agadir ou l’irrigation de la vallée du Souss où les hommes du 4e Etranger font ses preuves.
Au sud, la CMA s’est scindée en deux parties pour construire les postes de Foum El Hassan (sa garnison) et celui de Tindouf, situé déjà en Algérie, au cœur du désert, près de la frontière avec la Mauritanie. Un détachement de la compagnie y est toujours présent (jusqu’en 1940) pour maintenir l’ordre dans le secteur et pour rayonner au loin sur la Mauritanie, jusqu’à Fort Trinquet. C’est alors une mission très particulière pour une unité de Légion en Afrique du Nord.
Composition du 4e RE en 1935 :
- Etat-major + Compagnie hors rang (CHR) : Marrakech
- 1er Bataillon : Marrakech
- 2e Bataillon : Ouarzazate
- 3e Bataillon : Agadir
- Compagnie Montée Automobile (CMA) : Foum El Hassan
- Compagnie Sapeurs Pionniers (CSP) : Marrakech
- Batterie de marche : Ouarzazate
La période de 1935 à la fin de 1939, marquée par la paix totale sur l’ensemble du Maroc, est consacrée à l’instruction, aux travaux purement pacifiques, aux manœuvres, aux tournées de police, à la modernisation des unités du régiment. Les cinq années sans aucune lutte pour les légionnaires. Une chose très rare…
En septembre 1939, les tristes événements en Europe ont interrompu la période de la paix. L’ordre de mise sur pied de guerre arrive. La CSP est dissoute. Au sein des bataillons du 4e REI, des détachements sont constitués pour rejoindre la Métropole. Près de 500 légionnaires du 4e Etranger formeront en France les noyaux des deux nouveaux régiments (11e REI + 12e REI) ; trois compagnies seront destinées à la 13e Demi-brigade pour la campagne de Norvège. Également, deux autres détachements partiront renforcer le 5e REI au Tonkin et le 6e REI au Levant.
Au Maroc, le 4e REI considérablement réduit poursuit quand même ses missions. Sa batterie d’artillerie, devenue Batterie portée depuis la fin de 1939, est implantée à Port-Lyautey pour défendre la côte atlantique. Elle y est renforcée par la Batterie du 2e Etranger, affectée au 4e REI ; une troisième Batterie portée est créée au sein du régiment en 1940, à Mogador, avec la même mission. Néanmoins, la réduction d’effectifs et l’Armistice signé avec l’Allemagne en juin 1940 vont rendre une réorganisation du 4e Régiment Etranger du Lieutenant-colonel Gentis, le 15 novembre 1940, vingt ans exactement après sa création.
Le lendemain, le régiment toujours basé à Marrakech devient le nouveau 2e REI, renforcé par des éléments venant de ce dernier dissout à la même date. Les légionnaires du 1er Bataillon du nouveau 2e Etranger, bataillon de tradition du Régiment du Maroc, vont porter le chiffre « 4 » sur l’écusson de collet.
La 4e DBLE au Sénégal en 1941-1943
Pour faire place en Afrique du Nord aux rescapés du 6e REI du Levant, une demi-brigade fut créée le 16 août 1941 pour aller renforcer les troupes françaises au Sénégal. Ce pays de l’Afrique-Occidentale française (AOF) a vu déjà une tentative ratée de débarquement britannique et en attendait une autre. La nouvelle demi-brigade est formée avec des unités du 1er REI : sa compagnie régimentaire, ces deux bataillons et avec une compagnie du 3e bataillon. Le 25 août, les hommes débarquent en AOF, bientôt complétés par des légionnaires partant à l’origine vers le Tonkin; étant bloqués par les Britanniques au sud du Sénégal, ils ont dû faire demi-tour.
Sous le titre de 4e Demi-brigade de la Légion Etrangere (4e DBLE), la nouvelle unité a reçu le drapeau du 4e REI ; le commandement est confié au Lieutenant-colonel Auguste Gentis, le dernier chef de corps du 4e Etranger. Implantée à Saint-Louis (alors la capitale de l’AOF et du Sénégal ; P.C. + 2e Bon) et à Dakar-Bango (1er Bon), la demi-brigade se consacre surtout à l’aménagement des cantonnements, à l’instruction et aux manœuvres.
Pour éviter la léthargie et la monotonie du service, et pour resserrer la cohésion de la troupe, des tournées de brousse de deux à trois semaines à pied seront organisées par sections dans ce territoire désertique, avec un climat éprouvant.
En outre, une Compagnie de Sapeurs Pionniers (celle-ci du 2e REI, formée au Maroc) est rattachée en septembre à la 4e DBLE. Unité un peu mystique et très mal connue, avec ses détachements basés à Kéllé, Rosso et même en Mauritanie, à Nouakchott, la CSP va améliorer la route impériale reliant l’Algérie et le Sénégal.
Au début de novembre 1942, un débarquement des Alliés s’est déroulé en Afrique française du Nord et inversait la situation politique. Les troupes françaises en Afrique vont reprendre le combat contre l’Allemagne. En mars 1943, la 4e Demi-brigade quitte Sénégal pour le Maroc.
Le 1er REIM en Tunisie en avril-mai 1943
Ayant rejoint les Alliés, les troupes françaises en Afrique du Nord vont prendre part à la campagne de Tunisie, contre les forces de l’Axe (Allemands et Italiens). Après avoir resté un mois au Maroc, la 4e DBLE est envoyée par le chemin de fer en Tunisie, pour y incorporer le 1er Bataillon du 1er REI du commandant Pénette et former le 16 avril 1943 une nouvelle unité, le 1er Régiment Etranger d’Infanterie de Marche (1er REIM), toujours sous les ordres du Colonel Gentis et sous le drapeau du 4e REI.
Le régiment va participer dans cette campagne à cote de ses camarades du 3e REIM. Il sera engagé aux durs combats au Djebel Mansour, à Sidi Abd El Kerim, aux Djebels Rhian et Alliliga et, avant tout, dans la plaine de Pont de Fahs, au Djebel Oust et au Djebel Zaghouan, où les Italiens et les Allemands se rendront en masse.
Le 30 mai, le régiment est dissous. Pendant sa brève existence des six semaines de durs combats en Tunisie, le 1er REIM a gagné une citation à l’ordre de l’Armée et une nouvelle inscription sur le drapeau du 4e REI : Djebel Zaghouan 1943.
La 4e DBLE et le 4e REI au Maroc en 1946-1954
Pour assurer la présence de la France au Maroc après la Seconde Guerre mondiale, le « Régiment du Maroc » fut reconstitué à Fès le 16 mai 1946, tout d’abord avec un 1er batailon. Mais, à cause des événements qui s’aggravent en Indochine, il n’y aura pas assez d’effectifs pour former un régiment entier. Donc, le 16 septembre 1946, le nouveau 4e REI toujours en reconstitution devient la 4e Demi-brigade de la Légion Etrangere du Maroc (4e DBLEM).
Composée de deux bataillons et d’une compagnie montée (la dernière du genre, rattachée à la demi-brigade le mois suivant, en octobre), la 4e DBLEM se consacre d’abord aux travaux de route, à l’aménagement de ses camps, aux manœuvres ou aux tournées de police dans l’Atlas. Plus tard, un groupement d’instruction implanté à Fès sera former des jeunes recrues, en soutien la mission de la maison-mère de la Légion en Algérie.
En juin 1947, le deuxième bataillon de Meknès (basé au Quartier Bournazel qui s’appellera plus tard Quartier Bissey) quitte le Maroc pour devenir la première unité de la Légion étrangère à Madagascar en 1947-1951, pour y réprimer la révolte.
Un nouveau 2e Bataillon est donc organisé en novembre 1947 au Maroc, à El Hajeb, suivi par un troisième en octobre 1948, qui s’installera à Meknès. Avec ces trois bataillons, la demi-brigade redevient le 4eme Régiment Etrager d’Infanterie, le 16 octobre 1948.
En même temps, la guerre en Indochine demande sans cesse des nouveaux renforts. Presque chaque mois, un nombre des légionnaires du « 4 » partent pour l’Extrême-Orient. En septembre 1948, chacun de ses deux bataillons fournit une compagnie pour former en Algérie un certain 2e Bataillon Etranger de Parachutistes (2e BEP). En juin 1949, c’est le 2e Bataillon du 4e REI en entier qui est prêt pour rejoindre l’Indochine. Rebaptisé le 5e Bataillon et stationné au Tonkin (le nord du Vietnam), ses légionnaires assurent la frontière avec la Chine et gardent les routes reliant le Delta tonkinois. En novembre 1949, le bataillon deviendra le 2e Bataillon du nouveau 5e REI.
Au Maroc, le régiment continue à servir comme le réservoir d’hommes, pour ceux qui sont rentrés de l’Indochine aussi que pour ceux qui sont désignés d’y partir. Un nombre de sous-officiers et légionnaires à retour d’Extrême-Orient qui passent leur congé de fin de campagne aux bataillons du 4e REI sont souvent affectés pour faire l’encadrement des compagnies d’instruction. L’entraînement des jeunes par les anciens d’Indochine se succède avec les manœuvres et les tournées de police. Fin 1949, la compagnie montée de Ksar es-Souk, la dernière du genre, est dissoute. Le 1er janvier 1950, elle deviendra la Compagnie Portée.
L’année 1950 est marquée par une vaste diminution des effectifs partant en Extrême-Orient qui provoquera, le 31 mai 1951, une nouvelle dissolution du 4e REI. Ils ne restent que deux bataillons, l’un au Maroc et l’autre toujours stationné à Madagascar. Celui du Maroc, le 1er Bataillon, basé à l’époque avec la portion centrale au Quartier Bissey à Meknès, gardera le drapeau et les traditions du 4e REI comme une unité formant corps (c’est-à-dire unité considérée comme un régiment). Il est commandé par le Lieutenant-colonel Jules Gaucher.
Fin janvier 1952, le 4e Bataillon (ex-2e Bon) formant corps rentre de Madagascar. Installé au Quartier Fontanel à Fès, il se consacrera à l’instruction des jeunes (dirigés ensuit vers l’Indochine), aux travaux de toutes sortes et à maintenir l’ordre dans le protectorat. Là, les premières activités rebelles s’apparaissent en mars 1952, après dix-huit longues années de la paix. Le même mois, la Compagnie Portée est stationnée à Khénifra, pour calmer l’agitation dans ce secteur assez turbulent.
Cependant, avec la fin de la guerre en Indochine, la situation au Maroc deviendra vraiment grave en août 1954. C’est dans la Médina de Fès, où les deux bataillons du 4e REI participent à l’opération « Képi blanc ». Cette année aussi, pour avoir une idée précise des chiffres, le 4e Bataillon a dirigé sur l’Extrême-Orient au total 5 officiers, 70 sous-officiers et 830 légionnaires, bien que l’unité elle-même comprenait d’environ 650 hommes.
Le 4e REI au Maroc en 1955-1957
Le 1er mars 1955, le 4e REI est reconstitué, avec ses deux bataillons jusqu’alors autonomes ; le 4e Bataillon reprend son ancien numéro « 2 » de 1947. En même temps, une 2e Compagnie Portée est créée à Ksar es-Souk. L’instruction des jeunes recrues fut supprimée. Sous le commandement du Colonel Gustave Borreill, un ancien de la 4e DBLE au Sénégal, le 4e REI devient de nouveau un régiment de combat.
Ses unités sont rapidement dirigées sur Casablanca, Meknès, Khénifra et particulièrement sur Oued Zem, où se produisent en août des sauvages massacres des habitants européens. Malgré tout, le 4e REI rétablira l’ordre dans tous ces secteurs révoltés. Les opérations militaires continuent jusqu’à fin décembre, surtout au nord, dans le Rif.
En 1956, la situation politique se change considérablement. L’abandon du Maroc par la France est chose fait. Au début de mars de cette année, le Maroc obtient son indépendance. Fin juin, les unités du 4e REI sont alors envoyées sur la frontière algéro-marocaine dans l’Est du pays, jusqu’à Bouarfa et Figuig, des postes perdus dans une zone désertique. Là-bas, elles passent un été très chaud, aux côtés de leurs camarades du 2e REC. Beaucoup légionnaires voient dans cette mission une punition à la suite de l’indépendance marocaine.
Vers la fin d’octobre, les légionnaires regagnent ses garnisons. Le 16 novembre 1956, le 4e REI est encore une fois réorganisé, pour devenir un régiment d’infanterie porté moderne. Les deux bataillons sont dissous, remplacés par deux groupements portés (GCP, puis l’EMT). En incorporant le GPLEM (Groupement porté de Légion du Maroc, lui aussi supprimé à cette date), le nouveau 4e Etranger est composé de six compagnies portées équipées avec les Dodge 4×4 et 6×6, les AM-M8 et les Jeep. Avec le 2e REI, ce sont les deux premiers régiments portés de la Légion.
Pendant que les deux compagnies de l’ex-GPLEM vont partir vers la Mauritanie, le Régiment du Maroc quittera en mars 1957 son pays d’origine pour se déplacer en Algérie, où la nouvelle guerre a déjà commencé. Le 18 mars 1957, la 3e Compagnie Portée du Capitaine Gay passera la frontière algéro-marocaine comme la dernière unité de la Légion, laissant derrière elle 50 années de combats, de sacrifices, de travaux énormes… Une page de l’histoire s’est tournée.
Le 4e REI en Algérie en 1957-1964
Le nouveau 4e REI se dirige vers le Constantinois, une région située au Nord-Est de l’Algérie. Son P.C. s’installe à Tébessa, avec deux compagnies implantées autour Biskra et deux placées à Bir el-Ater et Négrine. Sous les ordres du Colonel Maurice Lemeunier, les quatre compagnies du régiment commencent à participer aux opérations du secteur, contre fellagas, les rebelles. Les accrochages, les différentes missions de reconnaissance, de protection ou de liaison, et les constructions de cantonnements se succèdent. Des harkis (des musulmans supplétifs servant dans une harka) sont rattachés au régiment.
Quant aux deux compagnies portées de l’ex-GPLEM, les 4e + 5e, elles sont stationnées à Fort Trinquet au nord de la Mauritanie, un territoire français qui le nouveau royaume chérifien du Maroc revendique comme sa partie intégrante. Les deux compagnies ont formé le Groupement des Compagnies Portées N° 2 (GCP 2). À cause de la distance importante du P.C. du régiment, de la différence de la zone d’opérations et de sa mission particulière, le GCP 2 deviendra unité formant corps le 1er août 1957. Au fait, la 4e Compagnie Portée avait connu la Mauritanie déjà en 1934, quand elle était encore appelée la Compagnie Montée Automobile du 4e REI…
Le GCP 2 autonome du commandant Mattei, après avoir participé en Mauritanie et aux confins marocains aux opérations à côté des légionnaires espagnols (comme les unités du 4e Etranger au nord du Maroc en 1925-26), il rejoindra en avril 1958 le gros du régiment en Algérie, comme la dernière unité de Légion.
Entre temps, le 4 janvier 1958, un nouveau drapeau est confié au 4e REI, remplaçant celui-ci daté des 35 ans de gloire.
En 1958, une « guerre du barrage » a commencé sur la ligne Morice, une ligne barbelée, électrifiée, minée et surveillée en permanence, qui courait le long de la frontière entre l’Algérie et la Tunisie, où les rebelles ont leurs camps et dépôts. L’ordre est de détruire toutes les bandes rebelles passant la frontière avec la Tunisie. Plusieurs unités de la Légion vont participer à cette mission, y compris le 4e REI.
Avec le P.C. du régiment basé depuis fin mars 1958 à Bir el-Ater au sud de Tébessa, près de la Tunisie, les compagnies portées patrouillent jour et nuit la ligne électrifiée du secteur, et chassent les fellagas, aux côtés des escadrons du 1er REC.
En août 1959, le 4e REI quitte Bir el-Ater pour faire mouvement encore plus au nord de l’Algérie. Il s’installera entre Bône, La Calle, Lamy et Guelma, pour y rester jusqu’en février 1962, avec toujours la même mission : surveiller le barrage.
Au début de février 1962, le 4e REI revient au sud, dans le secteur de Négrine, mais pas pour longtemps. Le 19 mars 1962, la Guerre d’Algérie est terminée et, le 3 juillet, la France reconnaîtra l’indépendance de l’Algérie. Pendant les combats dans ce pays, 3 officiers, 8 sous-officiers et 60 légionnaires du 4e REI sont morts pour la France.
Après l’indépendance, le régiment sera réparti dans le désert saharien, entre Touggourt, Ouargla et Hassi Messaoud. Les légionnaires y jalonnent les pistes et protègent les installations pétrolières. En mars 1963, les 2e et 3e CSPL, compagnies sahariennes, fusionnent avec le régiment.
En juin 1963, le 4e REI gagne encore le grand sud du Sahara (In Amenas, Fort Flatters, In Salah, Amguid) et puis, en octobre-décembre, l’ouest de l’Algérie, fief du 2e REI. Ses unités s’implanteront autour de Colomb Béchar ; le P.C. sera basé à Reggan. Là, quelques mois plus tard, une vaste réorganisation de l’Armée française en Afrique du Nord frappe le régiment déjà sensiblement réduit. Une dernière prise d’Armes se déroule à Reggan le 25 avril. Ensuit, le 30 avril 1964, jour de Camerone, le 4e Régiment Etranger d’Infanterie est dissous. C’est la disparition définitive du 4e REI au sol africain.
Comme en 1940, les légionnaires du 4e Etranger dissous s’amalgament avec ceux du 2e REI. Par contre, la musique régimentaire va rejoindre le 2e REP. Le drapeau est déposé au Musée de la Légion Etrangere à Aubagne. Il ne sera pas retiré qu’en septembre 1977, pour être confié au Régiment d’Instruction de la Légion Etrangere (RILE) de Castelnaudary, nouvellement créé. En juin 1980, ce dernier deviendra le 4e Régiment Etranger (4e RE), qui assumera le numéro, l’insigne, l’histoire et les traditions de l’ancien « Régiment du Maroc ». La légende continue…
4e REGIMENT ETRANGER D’INFANTERIE en 1920-1964: Une galerie d’images et de documents supplémentaires
4e REI: Les Chefs de corps
PERIODE | CHEF DE CORPS | |
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4e RE | 1920-1922 | Lcl MAUREL Lucien |
4e REI | 1922-1926 | Col MAUREL Lucien |
4e REI | 1926-1927 | Lcl POURAILLY Olympe |
4e REI | 1927 | Col POUPILLIER Edmond |
4e REI | 1927-1928 | Lcl POURAILLY Olympe |
4e REI | 1928-1933 | Col MATHIEU Joseph |
4e REI | 1933-1934 | Col CONTE Etienne |
4e REI | 1935 | Col GELY |
4e REI | 1935-1936 | Col CONTE Etienne |
4e REI | 1936-1940 | Col LORILLARD Paul |
4e REI | 1940 | Lcl GENTIS Auguste |
4e DBLE | 1941-1943 | Col GENTIS Auguste |
1er REIM | 1943 | Col GENTIS Auguste |
4e REI | 1946 | Lcl LAPARRA Félix |
4e DBLE | 1946-1948 | Lcl LAPARRA Félix |
4e DBLE | 1948 | Lcl BABLON Gabriel |
4e REI | 1948-1950 | Lcl BABLON Gabriel |
4e REI | 1950-1951 | Lcl RABERIN Jean |
4e REI | 1951 | Lcl SOURD |
4e REI | 1955-1957 | Col BORREILL Gustave |
4e REI | 1957-1959 | Col LEMEUNIER Maurice |
4e REI | 1959-1961 | Lcl GEORGEON Etienne |
4e REI | 1961-1962 | Lcl VADOT Michel |
4e REI | 1962-1964 | Lcl BRULE Jacques |
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Mes remerciements à Krzysztof Schramm pour partager ses photos et documents inédits avec nos lecteurs.
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Principales sources d’informations:
Képi blanc revues
Légion Etrangère revues
Bulletins annuels de la Légion Etrangère (les années 1950, 1960)
P. Cart-Tanneur + Tibor Szecsko: Le 4ème Etranger (Editions B.I.P., 1987)
J. Brunon, G.-R. Manue, P. Carles: Le Livre d’Or de la Légion Etrangère (Charles-Lavauzelle, 1976)
de Collectif: Historique des unités de la Légion étrangère pendant la guerre 1914-1918 (Maroc et Orient) (D. Heintz & Fils, 1922)
Alain Gandy: La Légion en Algérie (Presses de la Cité, 1992)
Martin Windrow: Our Friends Beneath the Sands: The Foreign Legion in France’s Colonial Conquests
(Weidenfeld & Nicolson, 2011)
Pierre Dufour: Génie-Légion (Lavauzelle, 2000)
Diego Falcone: Ma vie racontée… (An Italian in the Foreign Legion 1946-58; Paris, 2011)
Memorial Gen Web
Fanion Vert et Rouge
Wikipedia.org
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L’article original : 4th Foreign Infantry Regiment
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La page a été mise à jour le : 23 décembre 2020