12e Régiment Etranger d’Infanterie

Le 12e Régiment étranger d’infanterie (12e REI) est une unité de marche de la Légion étrangère chargée de défendre la France métropolitaine contre l’Allemagne nazie pendant la première phase de la Seconde Guerre mondiale. Le 12e REI est constitué fin février 1940. Pendant la bataille de France, il perd 90 % de ses hommes. Il est dissous en juin 1940.

 
12e Régiment Étranger d’Infanterie - L'histoire - 12e REI

 
 

Introduction

Début septembre 1939, les forces allemandes d’Hitler envahissent la Pologne. En réponse, la France et la Grande-Bretagne déclarent la guerre à l’Allemagne. Dans le cadre de la mobilisation générale qui s’ensuit, des milliers de volontaires étrangers se présentent dans les centres de recrutement. Compte tenu de la longue tradition de volontaires étrangers prêts à défendre la France, personne n’est surpris. Au lieu de cela, des ordres sont donnés pour former des unités composées de ces volontaires qui s’enrôlent pour la durée de la guerre. Pour des raisons administratives, ils sont affectés à la Légion étrangère.

Pour prendre en charge ces engagés volontaires pour la durée de la guerre (dits E.V.D.G.), un dépôt de la Légion est organisé à Sathonay, au nord de Lyon. Le dépôt de Sathonay est chargé de recruter, d’équiper, d’entraîner et d’administrer les futurs soldats qui seront affectés à l’une des unités de marche. Un centre d’instruction fut établi à proximité, au camp de La Valbonne. C’est là que fut constitué, fin 1939, le premier régiment composé des E.V.D.G., le 11e REI. Un autre régiment suivit au début de 1940.

 

Création du 12e Régiment étranger d’infanterie

Le 12e Régiment étranger d’infanterie (12e REI) est créé au camp de La Valbonne le 25 février 1940. Il est composé d’un état-major, d’une compagnie de commandement, d’une compagnie hors rang, d’une compagnie d’engins (canons anti-chars et mortiers) et trois bataillons. Chaque bataillon comprend trois compagnies d’infanterie et une compagnie d’accompagnement (mitrailleuses). Le lieutenant-colonel Jean Besson en prend le commandement. Officier de réserve, capitaine pendant la guerre 1914-18, il a servi dans l’armée d’Afrique avant de prendre sa retraite en 1937. Bien qu’il n’ait jamais servi dans la Légion auparavant, il connaît bien les légionnaires et leurs particularités grâce à son service en Afrique du Nord.

Certains pourraient se demander pourquoi le titre du régiment comprend-il un numéro aussi inhabituellement élevé. La réponse est simple. Pour distinguer les unités provisoires des régiments réguliers de la Légion pendant la guerre, le chiffre « 10 » a été ajouté à leur désignation. Le 11e REI a donc été créé en ajoutant « 10 + 1 », tandis que le 12e REI était la somme de « 10 + 2 ». D’autres unités provisoires composées de volontaires étrangers ont également été créées, et le chiffre « 20 » leur a été ajouté cette fois-ci.

Concernant le personnel, il s’agissait d’un mélange de divers groupes d’éléments. Il y avait des officiers de réserve et des sous-officiers mobilisés, y compris ceux qui avaient précédemment servi dans la Légion étrangère. Il y avait également d’anciens légionnaires mobilisés qui s’étaient installés en France. D’autres groupes d’officiers, de sous-officiers, de caporaux et de soldats venaient d’Afrique du Nord, aussi bien des régiments de la Légion étrangère que des régiments non-légionnaires. Un certain nombre d’officiers de réserve ou d’active n’avaient jamais servi en Afrique auparavant. Outre les légionnaires (actifs et anciens) et les E.V.D.G., la nouvelle unité comprenait des immigrés résidant en France métropolitaine, y compris des réfugiés (principalement juifs) fuyant Hitler.

Un groupe spécial et très distinct comprenait d’anciens républicains espagnols, participants à la guerre civile espagnole (1936-1939), qui représentaient environ un tiers du régiment. Ils faisaient partie des centaines de milliers d’Espagnols qui avaient fui vers des camps de réfugiés dans le sud de la France au début de l’année 1939.

Le régiment n’existant jusqu’alors que sur le papier, sa formation complète prendra plusieurs semaines. Celle-ci, incluant l’entraînement de base intensif, se déroulera directement dans le camp. L’entraînement est assuré par les légionnaires d’active ou retraités. Quant au matériel d’entraînement, il est simple et en nombre insuffisant. Il se compose de quelques modèles d’armes : des fusils Lebel Mle 1886-M93 très anciens, des fusils Berthier mle 1907/15, des mitrailleuses FM 24/29, quelques mitrailleuses Hotchkiss mle 1914, un mortier Brandt de 60 mm et un de 81 mm, et un canon antichar léger de 25 mm APX SAL (mle 1935 ou 1937).

Comme le 11e REI, le régiment lui-même souffrait également de pénuries de certains équipements et matériels en raison de la mobilisation générale en cours en France, qui avait perturbé la distribution des fournitures. Néanmoins, le moral restait bon et l’enthousiasme des hommes compensait ces lacunes.

Concernant les armes, les 11e et 12e Régiments étrangers sont équipés de mousquetons Lebel 1886-M35, de mousquetons Berthier Mle 92 ou de fusils Berthier 1907-15 M16. Ces derniers sont largement utilisés par l’armée française en 1940 ; le nouveau fusil MAS 36 n’est pas encore disponible en grand nombre.

L’organisation du régiment et l’entraînement de ses hommes au camp de La Valbonne ne s’achèvent qu’en mai 1940. C’est alors l’heure du départ tant attendu vers le front.

À cette époque, le 12e REI est composé de 84 officiers, 321 sous-officiers et 2 685 hommes de troupe (3 090 hommes au total). Parmi eux, se trouvaient environ 900 républicains espagnols, quelque 600 Juifs polonais et allemands ayant fui en France, ainsi que de nombreux Italiens et Polonais. En outre, 198 sous-officiers et 407 caporaux et légionnaires provenaient de régiments de la Légion stationnés en Afrique du Nord.

 

Composition du 12e REI en mai 1940

  • Commandement : lieutenant-colonel Besson
  • Etat-major : chef de bataillon Dury
  • Compagnie de commandement : capitaine Breuillard
  • Compagnie hors rang : capitaine Tizon
  • Compagnie régimentaire d’engins : capitaine Gavoille
  • 1er Bataillon : chef de bataillon Roux
  • 2e Bataillon : chef de bataillon Franquet
  • 3e Bataillon : chef de bataillon André

 
 

Legion Etrangere - France - 1939 - Camp de la Valbonne - carte

Legion Etrangere - France - Camp de la Valbonne
Camp de La Valbonne dans les années 1930. Les 11e et 12e REI y sont organisés en 1939 et 1940.
12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - Camp de la Valbonne - Fanion - 2e Bataillon
La marraine du régiment, avec l’aide du lieutenant-colonel Besson, remet les nouveaux fanions aux bataillons. Ici, on voit le nouveau fanion du 2e bataillon. Il porte un emblème réalisé par le lieutenant Mauduit, officier de réserve du bataillon. L’emblème a été créé dès 1939 et n’avait rien à voir avec le régiment, la Légion ou l’armée. Il figurait pourtant sur le fanion.
12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - Camp de la Valbonne - 1940 - Defilé
Après avoir reçu les fanions (26 avril 1940), les hommes du 12e REI défilent au camp de La Valbonne devant le lieutenant-colonel Besson et le colonel Debas, commandant du dépôt de Sathonay de la Légion étrangère.
12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - 1940 - Lieutenant Colonel Besson
Le lieutenant-colonel Jean Besson, commandant du 12e REI. Notez son insigne régimentaire.
12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - 1940 - Insigne
Insigne du 12e REI, dessiné en 1940. Il ne fut livré qu’en juillet 1940.

 

Début de la bataille de France

Depuis la déclaration de guerre début septembre, pratiquement aucune action sérieuse n’a eu lieu à la frontière entre la France et l’Allemagne. C’était la période calme de la « drôle de guerre ». La stratégie française à sa frontière avec l’Allemagne était strictement défensive, s’appuyant sur la célèbre ligne Maginot construite dans les années 1930.

Entre-temps, début mai 1940, les combats faisaient rage en Norvège entre les troupes françaises et britanniques d’une part et les forces allemandes d’autre part. Les Alliés (y compris la 13e Demi-brigade de Légion étrangère qui a joué un rôle important dans cette campagne) cherchent à s’emparer du port stratégiquement important de Narvik, d’où partaient des approvisionnements vitaux en minerai de fer suédois destinés à l’Allemagne nazie.

Pour renverser l’avancée des Alliés en Norvège et les forcer à retirer leurs troupes, l’Allemagne nazie lance Fall Gelb (cas Jaune), un plan de guerre pour l’invasion du Luxembourg, de la Belgique, des Pays-Bas et de la France. L’invasion a lieu le 10 mai par une offensive sur les trois premiers États (situés entre l’Allemagne et la France). La « drôle de guerre » est terminée. Par la suite, à partir du 12 mai, les forces armées allemandes contournent la ligne Maginot en avançant dans les Ardennes (une grande forêt du sud de la Belgique) et attaquent les lignes de défense françaises le long de la Meuse, dans le nord-est du pays. La bataille de France a commencé.

 

Bataille de l’Aisne

Le 12e REI à La Valbonne est alerté le 11 mai 1940 et envoyé dans le département de la Meuse. Il est affecté à la 8e DI du général Dody, division récemment recréée et maintenue en réserve dans le secteur de Bar-le-Duc.

Pendant ce temps, les unités blindées allemandes équipées de chars Panzer réussissent à franchir la frontière française plus au nord et pénètrent dans le département de l’Aisne. La bataille de l’Aisne commence le 17 mai.

La 8e Division, dont fait partie le 12e REI, est transférée de Bar-le-Duc à Château-Thierry dans l’Aisne le même jour.

Le 25 mai, le régiment est stationné à 40 km au nord, à Soissons. Fraîchement évacuée par ses habitants, c’est l’une des plus anciennes villes de France. Elle est située à une centaine de kilomètres au nord-est de Paris, dans un méandre de l’Aisne.

Les légionnaires se sont répartis sur neuf kilomètres de front et ont organisé la défense des sept ponts qui se trouvaient à l’intérieur et autour de Soissons, entre les villages de Pommiers à l’ouest et de Venizel à l’est. Ils ont également pris en charge un important dépôt de carburant dans ce dernier village. Leur mission était d’empêcher l’ennemi d’accéder à l’Aisne et de la traverser.
 
12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - 1940 - La Valbonne - Bar-le-Duc - Soissons - carte

12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - 1940 - Soissons - Les Ponts - carte
Les sept ponts défendus par les légionnaires du 12e REI à Soissons et dans les environs, entre les villages de Pommiers et de Venizel.

 

Bataille de l’Ailette

Le 29 mai, le 3e bataillon du commandant André reçoit l’ordre de se déplacer à 15 km au nord-est de Soissons, en direction de Vailly-sur-Aisne. Il y restera une semaine. Sur le chemin du retour vers la ville, le 4 juin, il est mis à la disposition de la 28e DIA (Division d’infanterie alpine) sous les ordres du général Lestien. La raison de ce renfort était l’avancée rapide de deux corps d’armée allemands, ceux des généraux von Speck (18. AK) et Kuntze (42. AK), vers les positions de la division alpine.

Ainsi, sous un feu intense d’aviation et d’artillerie, le 3e bataillon remonte vers le nord-est, jusqu’au Chemin des Dames, célèbre route qui fut le théâtre de plusieurs batailles meurtrières pendant la Première Guerre mondiale. Le bataillon s’installe au nord de la route, près de la ferme de La Malmaison, prêt à contre-attaquer l’ennemi qui avance.

La contre-attaque débute à 3 h 30 le 6 juin après une avance des chars français Renault R35. Cependant, la contre-attaque provoque un bombardement intense des positions françaises, suivi d’une offensive de la 42. AK, en particulier de sa 50. ID (division d’infanterie) sous le commandement du général Sorsche. La bataille dure dix longues heures. Malgré un équipement inadéquat et un manque de soutien aérien, les hommes du 3e bataillon du 12e REI, nettement moins nombreux, se défendent courageusement jusqu’à ce qu’ils soient à court de munitions et sacrifiés.

Deux jours plus tard, le 8 juin, le lieutenant Ducret et plusieurs dizaines de légionnaires valides se présentent à Soissons. Ils sont les seuls survivants des quelque 800 hommes du 3e bataillon.

12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - 1940 - Soissons - Chemin des Dames - carte
Après une semaine passée à Vailly-sur-Aisne, le 3e bataillon du 12e REI reçut l’ordre (sur le chemin du retour vers Soissons) de renforcer le 28e DIA sur le Chemin des Dames. Il y fut anéanti le 6 juin.

 

Bataille de Soissons

Le 12e Etranger, moins le 3e bataillon perdu au Chemin des Dames, demeure installé à Soissons sur la rive gauche de l’Aisne, prêt à défendre la ville avec d’autres unités de la 8e Division. Pendant ce temps, deux divisions d’infanterie allemandes de la 18. AK approchaient de leurs positions : la 290. ID du général Dennerlein à l’ouest de la ville et la 25. ID du général Clößner à l’est.

Dans la soirée du 6 juin, la 25. ID réussit à traverser l’Aisne à 9 km en amont de Soissons, près de Missy-sur-Aisne.

Dans la nuit du 6 au 7 juin, les sapeurs de la division font sauter les ponts de Pommiers, Pasly, Soissons et Venizel. Malheureusement, certaines destructions sont insuffisantes et l’infanterie ennemie (290. DI) parvient à traverser la rivière et à former une tête de pont. Soutenus par l’artillerie, les Allemands tentent également de traverser la rivière à d’autres endroits. Une bataille s’engage.

Le 12e REI reçoit l’ordre de tenir sa position et d’empêcher toute nouvelle avancée de l’adversaire. Les combats sont durs et les tirs des avions ennemis déciment les troupes. Les hommes du 1er bataillon se battent au nord-ouest, à Pasly, et à l’est de la ville, à Venizel. Les unités du 2e bataillon prennent position principalement à l’est de la ville, à Villeneuve-Saint-Germain. Les défenseurs, exposés à des tirs d’obus et de mitrailleuses constants, firent preuve d’un courage indomptable.

Pendant ce temps, la 3e compagnie, sous le commandement du capitaine Thomas, détruisit le dépôt de carburant de Venizel, contenant 5 000 tonnes d’essence, afin qu’il ne tombe pas aux mains de l’ennemi. L’officier, blessé plus tard au cours de la bataille, refuse d’être remplacé et continue à se battre.

La défense héroïque a duré toute la journée. Les défenseurs ont opposé une résistance farouche. Pourtant, le soir venu, des pénétrations ennemies sont réalisées dans les sous-secteurs voisins du régiment. À l’ouest se trouvaient des unités de la 290. DI. À l’est, autour de Venizel, les légionnaires faisaient face à des éléments de la 25. DI qui avaient également réussi à traverser l’Aisne.

Cerné sur trois côtés par une force supérieure et presque à court de munitions, le 12e REI reçoit finalement l’ordre de se replier plus au sud. Cependant, la communication dans les zones infiltrées par l’ennemi est très limitée. Par conséquent, certains éléments du régiment, comme la 2e compagnie du capitaine Boudet, ne se replient pas et se sacrifient sur place. La 290. DI s’empare de Soissons le deuxième jour, le 8 juin.

12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - 1940 - Soissons - Positions - carte
Soissons. Positions des 2e, 3e, 5e, 6e et 7e compagnies du 12e REI.

 

Retraite vers la Seine

Les 3e, 6e et 7e compagnies assurent la retraite des éléments lourds du régiment, comprenant les voitures, les camions et le train de ravitaillement. Cependant, ces colonnes sont repérées par l’aviation ennemie et subissent des bombardements. L’infanterie est peu touchée. En revanche, 130 chevaux sont tués. De plus, presque tous les voitures du train de ravitaillement du 12e REI, ainsi que 13 cuisines de campagne, ont été détruites.

Le régiment, qui avait déjà perdu plus de la moitié de ses effectifs, a été regroupé dans la nuit du 8 juin. Il est devenu l’arrière-garde de la 6e Armée nouvellement formée par le général Touchon (qui comprenait la 8e Division du régiment). Le 12e REI est immédiatement dirigé à une vingtaine de kilomètres au sud, vers Neuilly-Saint-Front, commune du sud de l’Aisne, près de l’Ourcq.

Comme l’Aisne, cette rivière et sa vallée forment une barrière naturelle qui offre une nouvelle position défensive au régiment. Les légionnaires ont occupé le site du 9 au 10 juin. Ils ont repoussé deux attaques allemandes et fait plusieurs prisonniers.

Puis le 12e REI poursuit sa retraite vers le sud, cette fois en direction de Nanteuil-sur-Marne. Là, les hommes tiennent bon pendant trois jours, jusqu’au 13 juin. Ils protègent efficacement le retrait de la 6e Armée malgré les tirs nourris de l’ennemi et toutes les tentatives d’encerclement.

Néanmoins, l’offensive allemande repousse la 6e Armée, avec le 12e REI en arrière-garde, 70 km plus au sud vers Montereau-Fault-Yonne, une ville au confluent de la Seine et de l’Yonne. Les unités du régiment prennent position à l’est de la ville, entre la Seine au nord et l’Yonne au sud. Disposées autour des communes de Balloy et de Bazoches-lès-Bray, avec le PC du colonel à Vinneuf, elles résistent pendant deux jours, les 14 et 15 juin, aux attaques ennemies.

Le 15 juin, la situation est critique. La veille, les troupes allemandes ont défilé dans les rues de Paris, qui n’est qu’à 70 km à l’ouest. Ainsi, vers midi, le lieutenant-colonel Besson transmet l’ordre de la 6e Armée de se replier à nouveau. Ses unités doivent traverser l’Yonne au sud de Vinneuf par le pont de Champigny.

Malheureusement, alors que les légionnaires passaient, mitraillés par les Allemands, le pont fut dynamité. Une grande partie du régiment – de la taille d’un bataillon, avec son commandant et trois capitaines – fut piégée au nord de l’Yonne, en zone ennemie. Après s’être battus jusqu’au soir, ces hommes furent faits prisonniers.

Par coïncidence, le même jour, dans le village voisin sur la gauche, le général Hermann von Speck de la 18. AK est devenu le premier général allemand à être tué pendant la Seconde Guerre mondiale. Il est mort en traversant un pont (à Pont-sur-Yonne) qui avait été détruit par les Français à l’époque. Le général von Speck avait participé, avec son corps d’armée, à la bataille près du Chemin des Dames entre le 5 et le 7 juin. C’est là que le 12e REI avait perdu son 3e bataillon.
 

12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - 1940 - Soissons - Montereau-Fault-Yonne - Repli - carte
Retraite de Soissons à Montereau-Fault-Yonne de la 6e Armée, avec le 12e REI en arrière-garde.

12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - L'ordre du colonel Besson du 15 juin 1940
Ordre manuscrit original du lieutenant-colonel Besson daté du 15 juin 1940.
12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - 1940 - Montereau-Fault-Yonne - Bazoches - Balloy - Vinneuf - carte
Les 14 et 15 juin 1940, le 12e REI résiste dans le secteur de Montereau-Fault-Yonne, entre la Seine et l’Yonne. Des unités sont postées aux environs de Balloy, Bazoches-lès-Bray et Vinneuf (PC). Le 15 juin, une partie du 12e REI reste bloquée sur l’autre rive de l’Yonne en raison de la destruction prématurée du pont de Champigny. Par coïncidence, le même jour, le général von Speck du 18. AK allemand devient le premier général allemand tué pendant la Seconde Guerre mondiale. Il meurt à Pont-sur-Yonne, non loin de là, alors qu’il traverse un pont qui a été détruit par les Français.
12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - Champigny - Pont
Nouveau pont à Champigny sur l’Yonne. Lorsque l’ancien pont s’est effondré le 15 juin 1940, une partie du 12e REI s’est retrouvée bloquée sur la rive opposée. Plusieurs éléments ont réussi à traverser la rivière à la nage. Néanmoins, les Allemands ont capturé la plupart des hommes bloqués.

 

Repli vers Bessines-sur-Gartempe et l’Armistice

Le 16 juin, le 12e Etranger se regroupe à Montargis, à 50 km au sud-ouest de Champigny. Des deux bataillons décimés, il ne restait qu’environ 180 hommes valides, soit l’effectif d’une compagnie d’infanterie. Ils seront renforcés par des légionnaires de la compagnie hors rang, du train régimentaire et des éléments isolés qui avaient perdu le contact avec leurs unités d’origine de la 6e Armée déjà largement décimée.

Encerclé et pressé par les forces blindées ennemies, ce petit groupe prend la direction du sud-ouest pour effectuer un repli de quelque 250 km du 16 au 22 juin via Gien, Bonny-sur-Loire, Brinay et Châteauroux. La retraite à pied ou en camion est un calvaire car les routes sont encombrées par un important exode de civils et d’autres soldats français cherchant à échapper à l’avancée des Allemands. Ayant subi de nouvelles pertes, les hommes sont ensuite transportés par camions à Bessines-sur-Gartempe, un village situé au nord de Limoges, dans la vallée de la Gartempe. Dans ce village, les survivants du 12e REI apprennent l’armistice du 22 juin entre le Troisième Reich et la France. Pour l’anecdote, l’armistice a été signé à Compiègne, une ville non loin de Soissons.

La bataille de France est terminée. Une ligne de démarcation divise le pays en deux parties : la zone occupée par l’armée allemande et la « zone libre » présidée par un nouveau gouvernement français transféré de Paris occupée à la ville de Vichy.

Le 23 juin, le 12e Régiment étranger d’infanterie cesse d’exister. Les 200 à 300 survivants épuisés du régiment, y compris les blessés, resteront trois jours à Bessines-sur-Gartempe. Le 25 juin, ils sont transportés à 120 km au nord-est, à Saint-Amand-Montrond. Dans cette petite ville, située dans le bassin du Cher, les légionnaires camperont jusqu’en août.

Le 30 juin, le 12e REI est cité à l’ordre de la Division par le général Dody, commandant la 8e DI. La citation indique que les légionnaires ont démontré partout « l’exemple de la Discipline et de la Valeur » et que le régiment « ne s’est jamais laissé abattre, ajoutant une page héroïque au Livre de Gloire de la Légion immortelle ».

De plus, le lieutenant-colonel et la 3ème compagnie sont cités par le général Touchon à l’ordre de l’Armée et du Corps d’armée, respectivement.

 

Les officiers du 12e REI morts pour la France en 1940

Capitaine Pierre Ruillier
– commandant de la 9e compagnie du 12e REI
– tué le 6 juin 1940 sur le Chemin des Dames

Lieutenant Raoul Dugau
– commandant de la CA1 du 12e REI
– tué le 14 juin 1940 à Bazoches-lès-Bray

Lieutenant Pierre Genet
– chef de section à la 5e compagnie du 12e REI
– tué le 10 juin 1940 sur l’Ourcq

Lieutenant Jacques Merlet
– chef de section à la CA2 du 12e REI
– tué le 8 juin 1940 à Villeneuve-Saint-Germain

Sous-lieutenant Alma Wildt
– l’officier d’origine italienne
– chef de section à la 11e compagnie du 12e REI
– tué le 6 juin 1940 sur le Chemin des Dames

Aspirant Arthur Dallin
– chef de section à la 1re compagnie du 12e REI
– gravement blessé le 6 juin 1940
– décédé le 12 juin 1940

Aspirant Charles Garnier
– chef de section à la 2e compagnie du 12e REI
– tué le 7 juin 1940 à Pasly

Aspirant Léon Gigarel
– chef de section à la 9e compagnie du 12e REI
– tué le 6 juin 1940 sur le Chemin des Dames

 
 

Conclusion

Lors de la bataille de France en 1940, les légionnaires, les réservistes, les ressortissants étrangers mobilisés et les volontaires étrangers du 12e Régiment étranger d’infanterie ont affronté un ennemi numériquement supérieur, soutenu par une artillerie lourde, des véhicules blindés modernes et des avions. Bien qu’ils appartiennent à un régiment nouvellement formé et qu’ils souffrent d’un équipement inadéquat et de munitions limitées, les hommes ont finalement fait preuve du même courage et du même esprit combatif que de vieux guerriers, malgré leurs origines différentes.

Décimés sur le Chemin des Dames, l’Aisne, l’Ourcq, la Marne, la Seine, l’Yonne, la Loire, le Cher, la Creuse et la Gartempe, ils ne se sont jamais laissés intimider par l’ennemi. Neuf hommes sur dix du régiment ont été tués, blessés ou faits prisonniers pendant la bataille de France.

En août 1940, après un long périple de 300 km vers le sud jusqu’à Caussade (une ville au nord de Toulouse), les survivants du 12e REI montent dans un train (40 hommes et cinq chevaux par wagon) pour rejoindre Marseille.

Là, ils sont dispersés dans toute la région entre les camps de Trets, d’Aubagne (la principale garnison de la Légion actuelle) et de Fuveau. Dans cette dernière commune, ils rejoignent leurs collègues du Dépôt de Sathonay de la Légion et du 11e REI dissous, qui étaient cantonnés dans cette ville depuis juillet.

Quelques jours plus tard, les légionnaires actifs évadés des deux régiments dissous quittent Fuveau pour retourner en Afrique du Nord.

Le dépôt de la Légion à Fuveau est dissous le 22 août. Les E.V.D.G. des deux régiments et du dépôt sont ensuite répartis en quatre unités de travail ; la plupart de ces hommes sont démobilisés au début de l’année 1941.

Dans les années 2000, la Légion a fait construire un monument aux morts dédié aux 11e et 12e REI, au sud de Trets, près de la route de la Légion, la route construite par les légionnaires campant à Fuveau en juillet-août 1940. Chaque année, début novembre, une cérémonie y est organisée pour rendre hommage aux hommes de ces deux régiments qui ont combattu avec bravoure en France en 1940.

Le 12e REI reste également probablement la seule unité de la Légion étrangère à avoir donné son nom à deux rues en France à la fois, à Soissons et à Villeneuve-Saint-Germain. Une piste connue sous le nom de « Rue du 12e Etranger » existe également à Neuilly-Saint-Front.
 

12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - 1940 - Champigny - Montargis - Châteauroux - Bessines-sur-Gartempe - Repli - carte
Le pénible repli du 12e REI de Champigny à Bessines-sur-Gartempe, entre le 15 et le 22 juin. Elle s’étendait sur 300 km.

12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - 1940 - Saint-Amand-Montrond - Caussade - Marseille - Fuveau - carte
L’odyssée malheureuse du 12e REI en France de mai à août 1940. Après avoir quitté le camp de La Valbonne pour Soissons, le régiment est contraint de se replier à Bessines-sur-Gartempe en juin. Là, les survivants apprennent l’armistice. Trois jours plus tard, ils se déplacent à Saint-Amand-Montrond et y restent jusqu’en août. Par la suite, après un long périple jusqu’à Caussade, les hommes du 12e REI sont transférés à Marseille et enfin à Fuveau. Dans ce secteur, ils sont démobilisés.
12e REI - 12 REI - Fanion du colonel
Fanion du colonel du 12e REI. Il porte la Croix de Guerre 1939-45 pour la citation à l’ordre de l’Armée, décernée au lieutenant-colonel Besson par le général Touchon de la 6e Armée le 30 juin 1940.
12e REI - 3e BEP - 2e BEP - Georges Masselot
Georges Masselot, qui a servi en tant que lieutenant au sein du 2e bataillon du 12e REI en 1940. Il a été grièvement blessé le 13 juin 1940. Masselot a servi dans la Légion de 1936 à 1958. Il a été emprisonné en 1961 pour sa participation active au putsch des généraux à Alger en 1961 à la tête d’un régiment de parachutistes (18e RCP). Il est décédé en 2002. La photo a été prise en Indochine, où Masselot commandait le 2e BEP (futur 2e REP).
12e REI - 1er REI - 3E REI - Jean Thomas
Jean Thomas, qui a servi au 12e REI en 1940 en tant que commandant de la 3e compagnie. Il a été blessé le 7 juin. Il a servi dans la Légion de 1926 à 1942 et de 1946 à 1956 et a commandé le 1er RE et le 3e REI. Le général Thomas est décédé en 1985.
12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - Stèle commémorative - La Malmaison - Chemin des Dames
Stèle commémorative pour les hommes du 3e bataillon du 12e REI, tombés sur le Chemin des Dames le 6 juin 1940. Elle y est inaugurée en 1990.
12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - Plaque commémorative - Soissons
Plaque commémorative installée sur le pont Gambetta à Soissons en mémoire des hommes du 12e REI.
12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - Monument - Villeneuve-Saint-Germain
Stèle du 12e REI à Villeneuve-Saint-Germain, à l’est de Soissons, dans les années 1960 et en 2010. Des hommes du 2e bataillon défendaient le village. La stèle a été érigée par M. de Ronde, ancien lieutenant du régiment.
12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - Plaque commémorative - Sermoise
Plaque commémorative sur l’église Saint-Rémi de Sermoise, un village à l’est de Venizel, pour commémorer les 32 soldats français qui y sont morts le 7 juin. Parmi eux se trouvaient des hommes du 12e REI.
11e REI - 12e REI - 12 REI - Monument aux morts - Trets
Monument aux morts dédié au 11e REI et au 12e REI au sud de Trets. Notez la borne de la Route de la Légion qui a été déplacée à cet endroit.
12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - Rue du 12eme REI - Soissons
Rue du 12eme REI à Soissons.
12e REI - 12 REI - Legion Etrangere - France - Rue du 12eme REI - Villeneuve-Saint-Germain
Rue du 12e REI à Villeneuve-Saint-Germain (à seulement 3 km de celle de Soissons). Le 12e REI est probablement la seule unité de la Légion étrangère à avoir donné son nom à deux rues en France à la fois (et à une petite piste à Neuilly-Saint-Front).

 
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Principales sources d’informations:
Képi blanc revues
Légion Etrangère revues
Vert et Rouge revues
Robert Forczyk: Case Red: The Collapse of France (Osprey Publishing, 2017)
Douglas Porch: The French Foreign Legion: A Complete History (Skyhorse Publishing, 2010)
Pierre Montagnon: Histoire de la Légion (Éditions Pygmalion, 1999)
Armée de Terre Française 1940 (Fr)
Seconde Guerre (Fr)
Collections d’Insignes et Souvenirs Militaires (Fr)
11e et 12e REI, 13e DBLE, 1939-1940 (Fr)
Fanion Vert et Rouge (Fr)
Mémorial Gen Web (Fr)
Mémoires des hommes (Fr)
Google Maps
Wikipedia.org

 
 
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L’article original: 12th Foreign Infantry Regiment

 
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La page a été mise à jour le : 10 février 2025

 

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