6e Bataillon du 1er REI de 1954-1955
En août 1954, la guerre en Indochine est terminée. Mais en Afrique du Nord – au Maroc, en Tunisie et en Algérie – une autre guerre contre la France commence. Pour répondre immédiatement à ces activités rebelles, des nouvelles unités de la Légion étrangère seront constituées par le gouvernement dans les mois suivants. Parmi eux, un tout premier bataillon d’infanterie entièrement motorisé aurait été créé au sein du 1er Régiment Etranger d’Infanterie (1er REI) : le 6e Bataillon, héritier d’une histoire prestigieuse.
Le nouveau bataillon aurait été composé de trois compagnies portées, c’est-à-dire les unités d’infanterie motorisée de haute mobilité ayant sa troupe transportée par les véhicules légers. Au fait, c’est l’évolution des compagnies montées.
Les trois compagnies sont formées entre novembre 1954 et janvier 1955. Le commandement du 6e Bataillon aurait été confié au chef de bataillon Reppelin, un ancien commandant du III/5e REI en Indochine en 1952-53. Mais à défaut d’officiers et de sous-officiers de Légion en Afrique du Nord (en ce temps-là, la majeure partie de la Légion reste encore en Indochine), on ne peut pas constituer un état-major suffisant pour cette nouvelle unité ; ses trois compagnies semi-autonomes restent donc considérées comme « fictives ».
Une curiosité : les hommes servant dans les trois compagnies portées ont le droit de porter la fourragère aux couleurs du ruban de la Croix de Guerre des Théâtres d’Opérations Extérieurs (T.O.E.) de l’ancien VI/1er REI. Le bataillon a reçu cette décoration pour ses faits d’armes au Maroc en 1925-26, pendant la guerre du Rif. Mais ce privilège ne durera que quelques semaines. À propos, le 1er Régiment Etranger (1er RE) d’aujourd’hui hérite, depuis 2019, de la même fourragère de son ancien 6e Bataillon.
Fin juin 1955, la portion centrale de la Légion est complètement réorganisée ; le 6e Bataillon est supprimé et ses trois compagnies portées déjà existantes deviendront indépendantes :
- 21e Compagnie Portée de Légion Etrangère (21e CPLE)
- 22e Compagnie Portée de Légion Etrangère (22e CPLE)
- 23e Compagnie Portée de Légion Etrangère (23e CPLE)
Les CPLE et le GPLEA en Algérie en 1955-1956
Au début, les compagnies étaient équipées des half-tracks et des scout-cars américains. Mais les half-tracks et la majorité des scout-cars seront échangés contre des véhicules mieux utiles dans les régions désertiques. Chaque compagnie nouvellement autonome est alors composée d’une section de commandement, de trois sections portées – dotées de cinq Dodge 6×6 chacune – et d’un peloton blindé qui comprend cinq auto-mitrailleuses AM-M8. Un Dodge WC-56 (command car) ou les Jeep servent le capitaine et les chefs de section ; plusieurs camions GMC et quelques half-tracks complètent en général la compagnie portée qui compte à peu près 150 hommes.
Les compagnies participeront aux opérations dans les régions montagneuses à l’Est du pays – dans l’Aurès et les Nementchas, et sur la frontière tunisienne où les activités rebelles sont nombreuses et les plus graves. De temps en temps, elles sont rattachées au quelque groupement interarmes provisoire. Mais ce n’est qu’au début de 1956, qu’une décision est prise : d’englober ces trois unités en un groupement autonome.
Donc, le 1er février 1956, un Groupement Porté de Légion Etrangère d’Algérie (GPLEA) est créé. L’objectif du nouveau groupement est de réunir les trois compagnies portées dispersées dans l’Est de l’Algérie et qui jusqu’alors formant corps.
En réalité, c’est une réincarnation partielle de l’ancienne idée du 6e Bataillon porté et, en même temps, un effort de constituer en Algérie d’une unité soeur au GPLEM : Groupement Porté de Légion Etrangère du Maroc. Néanmoins, le GPLEA fait face aux mêmes problèmes administratifs que son prédécesseur, le 6e Bataillon du 1er REI.
Sous les ordres du chef de bataillon Marcel Calvin, l’état-major provisoire du GPLEA s’implantera à Djelfa, la base arrière de la 22e CPLE depuis septembre 1955. C’est une ville au centre du pays, située au pied de l’Atlas saharien.
Le 1er mai 1956, le commandement du GPLEA est confié au lieutenant-colonel Jean Rossi, jusqu’en avril le chef de corps de la 13e DBLE (Demi-brigade de la Légion). Aussi, en mai, le capitaine Magnas de la 23e CPLE quitte sa compagnie pour être rattaché à l’état-major du nouveau groupement.
Ensuite, les compagnies jusqu’alors formant corps perdent leur autonomie et deviennent par une décision administrative les 21e, 22e, 23e Cies Portées du GPLEA.
Cependant, l’existence du groupement est très courte. Quelques mois plus tard, faisant face à l’indépendance du Maroc et de la Tunisie en mars 1956, le retour de toutes ses unités de l’Extrême-Orient et l’aggravation de la situation en Algérie, la Légion est encore une fois réorganisée. Les deux groupements portés avec leurs compagnies – dispersées en Algérie et au Maroc – seront intégrés soit au 2e REI (GPLEA), soit au 4e REI (GPLEM). Elles formeront de nouveaux groupements au sein de ces deux régiments, premiers « régiments portés » de la Légion.
Donc, en octobre 1956, après sa brève existence, le GPLEA est dissous et ses éléments sont intégrés dans le 2e Etranger. Les 21e, 22e et 23e Compagnie Portée du GPLEA deviendront ainsi les 4e, 5e, et 6e Compagnie Portée du 2e REI. Elles constitueront le Groupement de Compagnies Portées N° 2 (GCP 2, appelé plus tard Etat-Major Tactique N° 2, EMT 2) de ce régiment.
En mars 1957, avec leurs véhicules de couleur sable et leurs djellabas de Sahariens, les trois compagnies portées de l’ex-GPLEA (surnommées les « diables jaunes ») cédaient leurs cantonnements aux compagnies portées du 4e REI. Ensuite, elles vont traverser l’Algerie de l’Est en Ouest pour rejoindre le 2e REI, alors basé à Ain-Sefra, lieu de leur création deux ans plus tôt.
Pour compléter ce sujet, il est important de rappeler aussi une autre compagnie portée formant corps, la 24e CPLE. Celle-ci est créée en août 1955, pour opérer dans les sables à l’ouest de l’Algérie, sur la frontière avec le Maroc. Mais en janvier 1956, vivant très loin de ses unités soeurs, elle deviendra la 4e CSPL, dernière-née des compagnies sahariennes portées de Légion. La compagnie gardera son autonomie jusqu’en 1963.


———
Les motifs originaux inspirés par la Légion.
Découvrez-les dans notre boutique.
Merci de votre soutien.
—
Principales sources d’informations:
Képi blanc revues
Bulletins annuels de la Légion Etrangère (les années 1950)
Tibor Szecsko: Le grand livre des insignes de la Légion étrangère (S.I.H.L.E., 1991)
J. Brunon, G.-R. Manue, P. Carles: Le Livre d’Or de la Légion Etrangère (Charles-Lavauzelle, 1976)
Fanion Vert et Rouge
Google.com
Wikipedia.org
—
L’article original : Foreign Legion Algerian Motorized Group
—
Sur le même sujet:
Groupement des compagnies portées de Légion étrangère du Maroc
21e Compagnie Portée de Légion Etrangère
22e Compagnie Portée de Légion Etrangère
23e Compagnie Portée de Légion Etrangère
…ou voyez…
Tous nos articles en français sur la Légion étrangère
—
La page a été mise à jour le : 4 décembre 2021