Création du 6e REG
En 1984, l’armée française est réorganisée en tenant compte des missions au Tchad et au Liban. À la fin du mois de juin de cette année-là, une unité de génie de la Légion est dissoute à Laudun, dans le Gard, après six ans d’existence : la Compagnie renforcée de travaux routiers de la Légion étrangère (CRTRLE).
Le lendemain, ses hommes deviennent le socle d’une nouvelle unité : le 6e Régiment étranger de génie (6e REG), créé le 1er juillet 1984 au camp de l’Ardoise à Laudun. Il est le tout premier régiment étranger à porter ce terme. Le colonel Degré en prend le commandement.
Le 6e REG devient une unité de génie d’assaut de la Force d’action rapide (FAR) et est affecté, en tant que son régiment de génie, à la 6e Division légère blindée (6e DLB). Ce sont de nouvelles formations militaires créées le même jour.
En plus de son numéro, le nouveau régiment a repris l’insigne et les traditions de l’ancien « Régiment du Levant », le 6e REI, dissous en 1955.
Le 6e REG a hérité du camp de l’Ardoise du 7e Régiment de génie (7e RG) récemment dissous. Sa vaste superficie s’étend sur de plus de 130 hectares au nord d’Avignon. Sa zone bâtie (construite en 1971) sera rebaptisée « quartier général Rollet », en l’honneur du célèbre « père de la Légion ».
En octobre 1984, le 6e REG reçoit son drapeau. À cette date, il ne dispose encore que de la moitié de ses effectifs. Le régiment comprend une compagnie de commandement, d’appui et de soutien (CCAS, l’ex-CRTRLE) du capitaine Kampmeyer, et deux compagnies de combat : la 1re du capitaine Rychener et la 2e du capitaine Carayon. Les unités sont formées par des légionnaires fraîchement sortis de l’instruction, des volontaires d’autres régiments étrangers, et du personnel détaché d’autres régiments de génie, y compris l’ancien 7e RG, et les 21e, 29e, et le 34e RG.


Organisation et tâches du 6e REG
Les tâches principales du nouveau régiment sont d’être capable d’intervenir aussi bien en Europe que sur les théâtres d’opérations extérieures, d’ouvrir les routes aux unités de la 6e DLB, notamment grâce au dégagement d’itinéraires, à leur déminage et dépollution, l’aide au franchissement de cours d’eau, l’aménagement du terrain, la pénétration de défenses ennemies et leur destruction au moyen d’explosifs.
Parmi les autres tâches du 6e REG, on peut citer l’appui direct au combat (des actions d’assaut avec l’utilisation d’armes spéciales) ou la contre-mobilité qui se manifeste par la mise en place d’obstacles et de mines antichars et la destruction de ponts, routes, tunnels.
Les hommes du régiment doivent également maîtriser l’organisation du terrain (construction de positions de combat pour les troupes et les véhicules blindés, de tranchées, d’emplacements d’artillerie, etc.).
En outre, le 6e REG, fort de ses engins, participe régulièrement à des missions locales de solidarité et de sécurité, par exemple lors d’inondations. Il peut être aussi amené à réaliser des travaux au profit des forces armées ou de diverses collectivités locales.
Le régiment a reçu les VAB (véhicules de l’avant blindés) de type Génie, matériel nouveau et moderne à l’époque, afin d’assurer sa mobilité nécessaire pour suivre ou précéder les unités de la division.
La 3e Compagnie du capitaine Ferrand est créée en 1985. A ce moment-là, le régiment compte déjà environ 700 hommes. Ils sont alors commandés par le colonel Boileau.
En juillet 1986, la CCAS se scinde en deux unités. La première est la Compagnie de commandement et des services (CCS), chargée d’assurer le soutien administratif et technique aux unités de combat. En plus, elle dispose d’un groupe de spécialistes d’aide au franchissement (SAF) et d’un groupe de travaux subaquatiques et d’interventions offensives (TSIO) qui se transforma en Détachement d’intervention nautique opérationnelle subaquatique (DINOPS). Le DINOPS est composé de trois équipes de nageurs de combat. Ses missions sont triples : reconnaissance des points de franchissement, neutralisation des engins de destruction de l’ennemi et destruction des infrastructures ennemies. Il opère par parachutage, par héliportage ou par infiltration. Depuis 1989, le DINOPS compte 16 hommes répartis en deux équipes.
La deuxième unité créée en juillet 1986 est la Compagnie d’appui (CA) du capitaine Quirion. Elle regroupe en particulier les moyens lourds dont dispose le régiment. Composée d’une section de commandement, une section d’équipement et une section obstacles, la CA utilise des engins de terrassement, de minage ou d’obstruction et du matériel de pontage. La section équipement est principalement consacrée à l’organisation du terrain, tandis que la section obstacles est dotée, entre autres, d’enfouisseurs de mines, de distributeurs de mines et de moyens de forage rapide et de destruction.
En ce qui concerne les compagnies de combat, elles comprennent une section de commandement et trois sections de combat à deux groupes équipés de VAB-Génie. La 1re Compagnie est spécialisée dans les activités amphibies. La 2e Compagnie est la compagnie « montagne » ; elle se charge du minage et du déminage dans la neige et de l’utilisation d’explosifs en montagne. Quant à la 3e Compagnie, elle s’entraîne aux techniques de contre-mobilité et au combat aéromobile, avec ses détachements d’intervention héliportés.



6e REG de 1984 à 1989
En 1986, le séjour au camp de La Courtine constitue le premier véritable déploiement du 6e REG. D’autres séjours et manœuvres ont suivi, à Caylus, La Courtine, Canjuers, Mailly, au Valdahon, à Sissonne.
Fin 1984, la 3e Section de la 1re Compagnie est le premier élément du 6e REG envoyé en mission de courte durée à l’étranger. Elle sert alors comme section génie des Éléments français d’assistance opérationnelle (EFAO) en République centrafricaine, au sein de l’opération Barracuda.
La 2e Compagnie est en mission de courte durée en Guyane en 1985. Ces missions de quatre mois dans les profondeurs de la forêt tropicale se poursuivront régulièrement jusqu’en 1993, pour toutes les compagnies de combat du régiment.
En 1986, le régiment prend part au défilé du 14 juillet à Paris, pour la première fois.
L’année 1987 a vu la première sortie opérationnelle du 6e REG, commandé à l’époque par le colonel Martial. La section du lieutenant Delemarle de la 1re Compagnie arrive à Moussoro au Tchad pour servir comme élément génie lors de l’opération Épervier qui apporte un soutien au gouvernement local contre les forces libyennes. En novembre, la section est suivie par la 1re et la 3e Compagnie. Au cours de cette mission, le sergent-chef Stevo Panic deviendra le premier homme du régiment à se faire tuer en opération : son véhicule saute sur une mine.
La 1re Compagnie s’est distinguée pendant son séjour au Tchad et a été citée à l’ordre de l’Armée.
La même année, une autre section de la 1re Compagnie est envoyée à Bouar, en République centrafricaine.
En 1988, la 1re Compagnie se retrouve à Djibouti. En 49 jours, elle retire plus de 5000 mines dans le secteur de Doudah.
Quant à la 3e Compagnie, elle est, au premier semestre de 1989, la première (et également la dernière) unité du régiment engagée dans une mission de courte durée à Mayotte, dans l’océan Indien, au sein du Détachement de la Légion à Mayotte (DLEM).
Une section du régiment se rend de nouveau en République centrafricaine, en 1989, cette fois à Bangui, pour créer un jardin public. Le caporal-chef Noske décède accidentellement pendant les travaux.
En septembre de la même année, un petit détachement de deux officiers et trois sous-officiers du 6e REG arrive au Pakistan, pour participer, pendant quelques semaines, à l’opération Salam de l’ONU. Leur tâche est d’instruire les réfugiés afghans sur le danger des mines et sur les techniques de déminage, après le départ de l’armée soviétique d’Afghanistan.
Le mois suivant, le 6e REG célèbre le 50e anniversaire du 6e REI, créé en octobre 1939. De nombreuses personnalités ont assisté aux festivités, dont d’anciens officiers du 6e REI, avec à leur tête le général Barre, leur seul chef de corps.









6e REG de 1990 à 1994
En septembre 1990, à la suite de l’invasion du Koweit par l’armée irakienne de Saddam Hussein, la 2e compagnie du capitaine Rittimann est envoyée en Arabie saoudite, dans le golfe Persique. Fin décembre, c’est tout le 6e Régiment étranger de génie, sous les ordres du colonel Manet, qui rejoint ce territoire où il va participer, en tant que composante génie de la division Daguet, à la guerre du Golfe. Aux côtés de ses camarades du 1er REC et du 2e REI, le régiment est chargé d’ouvrir les axes de progression de la division, en direction de la base secrète d’As-Salman en Irak, sur la route Riyad – Bagdad. L’offensive « Tempête du désert » débute le 24 février 1991, avec le 6e REG en tête de la division. La base et le village d’As-Salman sont pris le 26, sans combat. La reddition de l’armée irakienne entraîne la fin de l’opération. Deux compagnies du régiment (1re et 3e) sont ensuite engagées à la dépollution des plages du Koweit (l’opération Harpon). Elles rentrent en France, fin mai.
Les services rendus par le 6e REG lui valent l’attribution de la Croix de guerre des TOE avec une citation à l’ordre de l’armée. Au cours de cet engagement, le régiment déplore la mort de l’adjudant-chef Sudre et du légionnaire de 1re classe N’Guyen.
L’année suivante, la formation d’une capacité d’intervention opérationnelle MINEX (mines et explosifs) est mise sur pied. Son objectif est d’appuyer les forces engagées dans les opérations extérieures et d’autre part, d’instruire des démineurs locaux dans le cadre d’opérations de maintien de la paix de l’ONU.
En mars 1992, un détachement du 6e REG arrive au Cambodge, dans le cadre de l’APRONUC, une opération de maintien de la paix. Les légionnaires ont pour mission d’instruire des démineurs locaux. Ils rentrent en France en octobre. Quelques semaines plus tard, fin novembre, un bataillon de Légion composé de légionnaires du 1er REC, du 2e REI et de deux compagnies du 6e REG (1re et 2e) est envoyé au Cambodge. Les hommes du 6e Étranger y effectuent du déminage, des travaux de réfection des routes, de pontage ou de terrassement. Ils portent, pour la première fois, le béret bleu de l’ONU. La 2/6e REG du capitaine Fradin, postée à Siem-Reap, fait face aux attaques des Khmers rouges. En juin 1993, le bataillon est dissous en France. Au Cambodge, le régiment perd le caporal-chef Curum.
En juillet 1992, une section du 6e REG, sous les ordres du lieutenant Nachez, est engagée en Bosnie, en ex-Yougoslavie, lors de la mission FORPRONU de l’ONU. Portant le casque bleu, les hommes ont des missions d’aide au déploiement et d’appui de mobilité aux unités de combat.
Fin décembre 1992, la 3e Compagnie du capitaine Julien débarque en Somalie, pour participer à l’opération Oryx. En soutien aux unités de la force de maintien de la paix des Nations unies, les hommes du 6e REG travaillent aux côtés de leurs camarades de la 13e DBLE. Engagée dans le secteur d’Oddur jusqu’en avril 1993, la compagnie a retiré environ 3 000 mines et détruit plus de 60 tonnes de munitions.
Une section de légionnaires du 6e REG retournent en Bosnie en juillet 1993, pour être basés à l’aéroport de Sarajevo, alors théâtre de durs affrontements entre Serbes et Bosniaques. Ils détruisent une grande quantité de mines, de munitions, d’armes et d’explosifs. La Compagnie d’appui du régiment est également engagée en même temps en Bosnie.
En 1994, une section du 6e REG, du lieutenant Da Silva, est désignée pour servir au cours de l’opération Turquoise au Rwanda. Elle est chargée d’enterrer les victimes du génocide et de surveiller la distribution de vivres.
Entre-temps, pour commémorer le 10e anniversaire du régiment, un nouvel insigne est créé et distribué aux hommes.














6e REG de 1995 à 1999
En juillet 1995, la Compagnie de commandement et des services (CCS) devient, par transformation, Compagnie de commandement et logistique (CCL).
La même année, le 6e REG est de nouveau en Bosnie, représenté par trois compagnies (1re, 3e, CA). Celles-ci sont remplacées plus tard dans l’année par la 2e Compagnie du capitaine Cornefert. Le caporal Cléran meurt au cours de cette mission. L’ensemble du régiment (moins la 2e compagnie) continue de servir en Bosnie même en 1996, désormais dans le cadre de la mission IFOR de l’OTAN (au sein de la Division Salamandre de la France). Installés à Rajlovac de janvier à mai, les légionnaires du 6e REG font le déminage de la région et du secteur de Mostar. Ils réalisent aussi des travaux d’infrastructure, dont la construction d’un pont à Aleksin.
En juillet 1996, la 4e Compagnie du capitaine Lagarde est créée. Elle se spécialise dans le combat en zone urbaine; ses légionnaires sont aussi spécialisés dans l’utilisation d’explosifs, dans le déminage et la dépollution et l’organisation du terrain.
L’année suivante, en 1997, les capacités d’intervention MINEX et NEDEX (neutralisation, enlèvement, destruction d’engins explosifs) sont réunies au sein des régiments de génie, sous la dénomination de structure EOD. L’appellation EOD signifie Eléments Opérationnels de Déminage/dépollution. Le sigle EOD retenu est le même que la dénomination anglo-saxonne correspondant à Explosive Ordnance Disposal. Les éléments de cette structure EOD sont appelés à intervenir dans les domaines suivants : le déminage, la dépollution pyrotechnique, l’intervention sur les munitions et explosifs ou sur les explosifs improvisés.
Également en 1997, une section de la CCL se trouve à Bouar en République centrafricaine, ou elle effectue de nombreux travaux divers. Plus tard dans l’année, une section de la 1re Compagnie, sous les ordres du lieutenant Prenveille, participe à l’exercice multinational Bright Star en Égypte.
L’année suivante, de janvier à mai 1998, la 4e compagnie se rend à Mostar, en Bosnie, dans le cadre de la SFOR de l’OTAN. Entre-temps, une section de la CA est partie en renfort du 5e RE en Polynésie française. Un détachement du 6e REG au Tchad entraîne l’unité locale de génie de combat, de mai à septembre. Enfin, en août, les hommes du 6e REG retournent à Djibouti après de nombreuses années. La 3e Compagnie forme la compagnie du génie de la 13e DBLE, après la récente dissolution de sa compagnie de travaux. La 2e compagnie remplace ses camarades en décembre.
A partir de la fin mai 1999, les 1re et 3e Compagnies du régiment sont intégrées à la KFOR de l’OTAN et effectuent diverses missions en Macédoine et au Kosovo, toujours en ex-Yougoslavie.
Au cours de toutes ces opérations, de 1984 à 1999, le régiment a perdu 8 sous-officiers et légionnaires.
Le 1er juillet 1999, après la création d’un deuxième régiment de génie à la Légion, le 6e REG du colonel Ganascia change de numéro et devient le 1er Régiment étranger de génie (1er REG).











———
Principales sources d’informations :
Képi blanc revues (1984 – 1999)
Tibor Szecsko, Daniel Riffet: 6e Étranger de Génie (Editions Atlas, 1990)
Pierre Dufour: Génie-Légion (Lavauzelle, 2000)
———
Les motifs originaux inspirés par la Légion.
Découvrez-les dans notre boutique.
—
L’article original : 6th Foreign Engineer Regiment
—
En savoir plus sur l’histoire de la Légion :
Groupement Porté de Légion Etrangère du Maroc
Legionnaires parachutistes pendant la Seconde Guerre mondiale
Pelotons de Réparation de Légion Etrangère
61ème Bataillon Mixte de Génie Légion
…ou voyez…
Tous nos articles en français sur la Légion étrangère
—
La page a été mise à jour le : 8 juillet 2024