Régiment de Hohenlohe (1815-1831)

Le Régiment de Hohenlohe est un régiment d’infanterie de l’armée française composé de volontaires étrangers. Il est constitué par un décret de 1815, après l’abdication de Napoléon Ier et la dissolution des huit régiments étrangers servant dans l’armée napoléonienne. L’unité est composée de soldats étrangers qui demandent à continuer à servir en France sous la monarchie restaurée. Il porte le nom de Louis Aloysius, prince de Hohenlohe-Waldenburg-Bartenstein, prince allemand et maréchal de France. Après son dissolution en 1831, il est remplacé par la Légion étrangère.

Régiment de Hohenlohe 1815-1831

 

Introduction

En 1815, après le retour en France de l’empereur Napoléon Ier, pendant les Cent Jours, il avait été formé huit régiments étrangers au service de la France. La défaite de Napoléon à Waterloo et son abdication laissèrent remonter sur le trône Louis XVIII ; le régime de la Restauration fut rétabli. Le roi ordonna une nouvelle réorganisation de l’armée française, par sa réduction et création des « légions » au lieu des régiments.

L’ordonnance royale du 6 septembre 1815 supprima donc les huit régiments étrangers et décida la formation d’une seule légion pour recevoir les étrangers qui demanderaient de continuer au service de la France. Cette nouvelle unité prit le nom de Légion Royale Etrangère ; ses deux dépôts furent organisés à Lyon et à Toulon.

 

Légion Royale Etrangère

La Légion Royale Etrangère est placée sous le commandement du comte de Sayn-Wittgenstein, venant d’une famille de la haute noblesse allemande. Le 1er janvier 1816, deux bataillons de la Légion sont officiellement constitués par le colonel Wittgenstein à Toulon, comptant ensemble 28 officiers et 635 hommes de troupe. Un autre bataillon sera organisé à Lyon une semaine plus tard, avec 15 officiers et 462 sous-officiers et soldats ; chacun des trois bataillons doit comprendre huit compagnies.

L’organisation, l’administration, et la solde sont les mêmes que pour des autres légions. Comme toutes les autres elle a reçu un drapeau blanc, et la cocarde blanche a remplacé sur la coiffure la cocarde tricolore.

L’effectif de l’unité a été fixé à 2 450 hommes, âgés tout au plus de trente-cinq ans et ayant une taille au moins de 1 m 62 (cinq pieds). L’engagement est d’une durée de six ans avec la possibilité de se réengager pour quatre ou six ans.

L’uniforme de la Légion Royale Etrangère était le suivant : habit bleu de ciel ; collet, revers, parements et patte jonquille ; boutons blancs ; gilet de tricot jonquille ; pantalon blanc avec passepoil jonquille sur les coutures des côtés ; shako ; capot d’infanterie gris beige.

Officiellement, les Français comme les Suisses (qui avaient leurs propres unités suisses en France) étaient exclus du recrutement de cette Légion. Mais ces restrictions ne furent pas trop respectées.

En mai, la Légion arrive dans la région de Grenoble pour y rétablir l’ordre ; elle se trouve réunie à Grenoble au commencement de juin.

C’est à ce moment que la Légion est placée sous le haut commandement du prince Louis Aloy de Hohenlohe-Waldenburg-Bartenstein, ou le prince de Hohenlohe, qui en devient « colonel supérieur ». Ce prince, appartenant à la haute-noblesse germanique, a servi dans l’armée depuis 1792 et devient lieutenant général autrichien.

 

Légion de Hohenlohe

Le 9 juin 1816 à Grenoble, la Légion Royale Etrangère a donc changé de nom et est devenue Légion de Hohenlohe. Elle demeure sous les ordres du colonel de Wittgenstein, avec le prince de Hohenlohe servant comme son supérieur, et l’inspecteur de la Légion. Le colonel doit envoyer au prince (installé à Paris) des rapports réguliers sur la situation de la Légion en termes de discipline et de comptabilité.

Fin juin, deux bataillons quittent Grenoble. En juillet, le dépôt de la Légion est organisé à Avignon.

Durant la plus grande partie de l’année 1817, la Légion reste toujours dans le sud-est de la France. L’état-major et le 1er bataillon sont implantés à Valence (Drôme), le 2e bataillon à Romans-sur-Isère et le 3e à Briançon. Mais plus tard, deux bataillons quittent la France pour la Corse : le 3e en septembre, puis le 2e en décembre.

En janvier 1818, le colonel de Murphy, un émigré irlandais servant la France depuis 1800, a remplacé le colonel de Wittgenstein, décédé. En même temps, le prince de Hohenlohe est élevé au grade de « maréchal de camp » (général de brigade).

En février 1819, l’état-major et le 1er bataillon débarquent aussi en Corse et s’installent à Bastia. Le dépôt est d’abord transféré d’Avignon à Toulon, puis il rejoindra la Légion en Corse.

A l’époque, au début de 1820, la Légion est commandée par le colonel de Marphy, avec le lieutenant-colonel Cally comme son adjoint, et les commandants Heuzard de Beaurepaire, Muston et Bay servant comme chefs de bataillon. Le prince de Hohenlohe, maréchal de camp, reste le « colonel supérieur » de sa Légion.

Par une ordonnance royale d’octobre 1820, les légions de l’armée française sous la Restauration doivent à nouveau être transformées en régiments. Cela concerne également la Légion de Hohenlohe.

 

Légion de Hohenlohe - Regiment de Hohenlohe - Louis Aloys, prince de Hohenlohe-Waldenburg-Bartenstein
Louis Aloys, prince de Hohenlohe-Waldenburg-Bartenstein, colonel superieur de la Légion de Hohenlohe. Né en 1765 à Bartenstein (l’Allemagne actuelle), dans l’armée depuis 1792. Général autrichien, il demanda fin 1815 à Louis XVIII la permission de servir dans l’armée française et de commander la Légion royale étrangère.

Légion de Hohenlohe - Grenadier - 1816
Grenadier de la Légion de Hohenlohe en 1816. Dessin de Louis Frégier, 1963.
Légion de Hohenlohe - Grenadier - 1816 - 2nd Battalion - Porte-fanion
Caporal porte-fanion du 2e bataillon de la Légion de Hohenlohe en 1816. Dessin de Herbert Knoetel, années 1950.
Légion de Hohenlohe - Grenadier
Egalement, un grenadier de la Légion de Hohenlohe. Dessin du colonel Joly, vers les années 1840 ou 1850.
Légion de Hohenlohe - Stamp - Board of directors
Cachet du Conseil d’administration de la Légion de Hohenlohe, 1816-1821.

 

Régiment de Hohenlohe

Le 22 février 1821, une ordonnance a changé le titre de la Légion qui est devenue Régiment de Hohenlohe. Elle a aussi ordonné une réorganisation partielle de cette unité. Les trois bataillons à huit compagnies demeurent. Le bataillon, qui a adopté le modèle de l’infanterie de ligne, doit comprendre six compagnies de fusiliers, une compagnie de grenadiers, et une de voltigeurs. L’effectif de la compagnie est fixé à 3 officiers (1 capitaine, 1 lieutenant, 1 sous-lieutenant) et à 80 hommes : 1 sergent-major, 4 sergents, 1 caporal-fourrier, 8 caporaux, 64 soldats, 2 tambours (ou cornets).

L’état-major du régiment, renforcé par un aumônier et un aide-major, comprend aussi un petit état-major qui s’est constitué de : 3 adjudants, 1 tambour-major, 3 caporaux-tambours, 12 musiciens (dont un chef) et 4 maitres-ouvriers (un tailleur, un guêtrier, un cordonnier, un armurier).

L’effectif du Régiment de Hohenlohe est donc réduit à 88 officiers et de 1 943 hommes. Le recrutement du corps est assuré, comme auparavant, par l’engagement de volontaires étrangers.

Selon l’ordonnance, le régiment devrait recevoir un drapeau portant l’écusson des armes de France, en échange de ceux de la légion ; les cravates des drapeaux actuels seront conservées et rattachées au nouveau drapeau.

En 1822, après un séjour de quatre années, le régiment quitte la Corse et fait mouvement vers le nord-ouest de la France, au Havre. Le 2e bataillon se rend à Amiens. L’année suivante, le Régiment de Hohenlohe s’installe à Cherbourg en Normandie, avec le 2e bataillon détaché à Caen. Entre temps, un détachement de volontaires destiné à l’Expédition d’Espagne – en soutien du roi local, Ferdinand VII, contre les libéraux – est fourni par le régiment. Dans cette campagne de 1823, le prince de Hohenlohe a commandé, en tant que général, l’un des corps d’armée (deux divisions d’environ 16 000 hommes).

En 1824, le régiment part à Brest, où il va séjourner jusqu’en 1827.

En mai 1825, le colonel de Murphy est, lui aussi, nommé maréchal de camp (général). Il sera d’abord remplacé à la tête du Régiment de Hohenlohe par le colonel de la Moussave, puis, fin décembre, par le colonel Duprat.

Après avoir quitté Brest en 1827 pour La Rochelle et Rochefort dans le sud-ouest de la France, le régiment s’est réparti l’année suivante entre Narbonne, Foix et Carcassonne, dans le sud du pays. En avril 1829, il s’implante à Pont-Saint-Esprit, avec un bataillon détaché à Uzés, toujours dans l’ancienne région du Languedoc-Roussillon au sud de la France. En raison du grand nombre d’hommes libérés et des difficultés de recrutement, l’effectif de l’unité a tombé en mai 1828 au chiffre de 1 437 hommes ; en mars 1829, le régiment ne compte pas plus de 1 300 hommes.

En mai 1829, le prince de Holonlohe, maréchal et pair de France depuis deux ans, s’est éteint. Avec lui cesse également la fonction de colonel supérieur.

Quelques mois plus tard, en juillet, le 3e bataillon est supprimé. Ensuite, le colonel Duprat quitte le commandement ; il sera remplacé par le colonel Pozzo-di-Borgo.

Au commencement de l’année 1830, le recrutement semblait être de plus en plus difficile. Réduit à deux bataillons, le corps ne dispose pas plus de 850 hommes sous les armes.

Fin mai, le régiment se rend à Marseille. Il s’y trouve au moment des événements de juillet 1830, dites « Trois Glorieuses » ; son action décidée mais prudente permettra d’arrêter l’effusion du sang et de sauver cette ville populeuse des atrocités de la guerre civile. Les deux bataillons y resteront jusqu’à la fin de l’année.

En octobre, la municipalité de cette ville a offert au régiment un drapeau d’honneur en remerciement des services rendus par le régiment pendant les événements de juillet 1830. Sur l’une des faces, le drapeau portait cette inscription : « Marseille au Régiment de Hohenlohe » ; sur l’autre face, il y avait une couronne de lauriers avec ces mots au bas : « Vive le Roi des Français ». Conservé par la famille du colonel de Huelsen, commandant en second du régiment et l’un des futurs chefs de la Légion étrangère, ce drapeau a été malheureusement détruit en 1889, dans un incendie.

Début décembre, le régiment reçoit l’ordre de s’embarquer à destination du Péloponnèse, une péninsule grecque. Sa mission est de relever les troupes françaises du général Schneider, qui ont participé à la libération de la région des forces d’occupation turco-égyptiennes, lors de la guerre d’indépendance grecque. Fin décembre 1830, les deux bataillons débarqueront à Methóni, dans le Péloponnèse. En France, l’unité n’a laissé que son dépôt à Toulon.

 

Régiment de Hohenlohe - Soldat - 1824
A soldier of the Hohenlohe Regiment par Eugène Lami. Painted around 1822; published in 1824.

Régiment de Hohenlohe - Fusilier - 1822
Fusilier du Régiment de Hohenlohe en 1822, avec capot. Dessin de Pierre Benigni, 1935.
Régiment de Hohenlohe - Grenadier - 1822
Grenadier du Régiment de Hohenlohe en 1822 par Pierre Benigni, non daté.
Régiment de Hohenlohe - Shako
Un membre du Régiment de Hohenlohe, avec shako. Dessin de Andreas Rosenberg (1906-2002), non daté.

 

21e Régiment d’infanterie légère

Mais la nouvelle année amène une fin définitive pour ce corps étranger. Par l’ordonnance royale du 5 janvier 1831, le Régiment de Hohenlohe est dissous. Il devrait être réorganisé en un régiment d’infanterie légère qui prendra le numéro 21.

La dissolution du Régiment de Hohenlohe est officiellement prononcée le 20 février 1831 à Methóni, par le général Schneider, devant le régiment rassemblé. Les hommes sont sous les ordres d’un nouveau chef, le colonel Augustin Stoffel, qui a pris son commandement le jour auparavant. Ce dernier, d’origine suisse-espagnole, est le frère du colonel Christophe Stoffel, le premier chef de corps d’une certaine Légion étrangère, qui sera créée le mois prochain, en mars 1831.

Au cours de la même cérémonie, suivant l’ordonnance du 5 janvier, le général Schneider a proclamé la création du 21e Régiment d’Infanterie Légère, forts au total de 40 officiers et de 470 sous-officiers ou soldats, tous anciens du Régiment de Hohenlohe. Son 1er bataillon est commandé par le chef de bataillon de Mollenbeck, un officier d’origine allemande et, lui aussi, le futur chef de la Légion étrangère.

Officiellement, le nouveau régiment n’est ouvert qu’aux hommes nés ou naturalisés Français. Aussi, ceux qui ont promptement exécuté les déclarations exigées par la loi pour être naturalisés peuvent continuer à servir dans l’unité. Les autres ont reçu des documents, avec indemnité, pour retourner dans leur patrie. Mais ces derniers sont peu nombreux et officiers, sous-officiers et soldats se font naturaliser en masse.

Le nouveau régiment devient une partie intégrale des troupes métropolitaines de l’armée française. Comme toutes ces unités à l’époque, le 21e Léger ne sera réalimenté que par des recrues provenant de la conscription dans les départements français. L’histoire de l’héritier direct des régiments étrangers de l’armée napoléonienne prend ainsi définitivement fin.

 

Conclusion

Trois semaines après la dissolution du Régiment de Hohenlohe, une nouvelle unité composée de volontaires étrangers est créée en France, par l’ordonnance du roi Louis-Philippe du 10 mars 1831 : la célèbre Légion étrangère. Le 1er bataillon de cette Légion est réservé, entre autres, à une centaine d’anciens soldats du Régiment de Hohenlohe, non-naturalisés. De plus, la nouvelle unité a aussi accueilli un nombre d’officiers de ce régiment dissous.

Ainsi, certaines des anciennes traditions ont pu être préservées pour l’avenir. Parmi elles, par exemple, la marche lente à la cadence de 88 pas par minute, que les historiens de la Légion associent au Régiment de Hohenlohe. Cette marche mythique est bien connue du public et distingue l’actuelle Légion étrangère de toutes les autres unités de l’Armée française et, en fait, de la plupart des armées modernes dans le monde. L’héritage d’une vieille unité peut continuer…

 

Régiment de Hohenlohe - Certificat de bonne conduite - 1826
Certificat de bonne conduite pour un fusilier de la 4ème compagnie du 2e bataillon du Régiment de Hohenlohe, délivré en Brest en 1826, par le capitaine Philippé, alors son commandant de compagnie.

Régiment de Hohenlohe - Bouton
Bouton du Régiment de Hohenlohe, 1821-1831. L’illustration (probablement) par l’ADC Burda, 1980s.

 
 
———
 

Principales sources d’informations :
Képi blanc revues (des années 1955, 1963, 1972, 1973, 1980, 2005, et 2008)
Miles Byrne: Mémoires d’un éxilé irlandais de 1798 (Gustave Bossange, 1864)
J. B. Bouvier: Historique du 96e Regiment d’infanterie (A. Storck, 1892)
Gustave Schlumberger: Mémoires du Commandant Persat (Librairie Plon, 1910)
Jean Vidalenc: Une formation originale dans l’armée de la Restauration : La « Légion-Régiment-de-Hohenlohe » (Presse Universitaires de France, 1964)
P. Cart-Tanneur + Tibor Szecsko: La Vieille Garde (Editions B.I.P., 1987)
J. Brunon, G.-R. Manue, P. Carles: Le Livre d’Or de la Légion Etrangère (Charles-Lavauzelle, 1976)
Fanion Vert et Rouge
Wikipedia.org
Google.com

 

 

Legion Etrangere Info boutique - bannière

Les motifs originaux inspirés par la Légion.
Découvrez-les dans notre boutique.

 

 

L’article original : Hohenlohe Regiment (1815-1831)

 

 

Sur le même sujet:
Deuxième Légion Etrangère – Légion Suisse
Historique du 1er Régiment Etranger
Guerre franco-prussienne de 1870

 

 

Tous nos articles sur la Légion en français:
Liste des articles en français sur la Légion étrangère

 

 

La page a été mise à jour le : 22 février 2022

 

↑ Haut de la page